Rosheen Brogan -finie-

Rosheen est native d’Irlande, d’une mère irlandaise et d’un père anglais. Le couple avait choisi l’île d’émeraude pour bâtir leur famille, mais le travail du père de Rosheen l’avait rappelé sur sa terre d’origine. La jeune femme ne connaît donc pas grand-chose de ses racines, mais ne s’en plaint pas. Elle était inscrite dans une école privée à Manchester, lieu où les Brogan domiciliaient. Rosheen fut élevée dans une grande maison située en périphérie de la ville. C’était une superbe demeure datant peut être de la fin du XIXeme siècle, et qui dit grande demeure, dit occupation. C’est pourquoi Rosheen fut vite habituée à la présence d’hybrides. Il était normal pour elle que ces gens spéciaux s’occupent de tâches ménagères ou du jardin, ou encore qu’ils rangent sa chambre. A vrai dire, elle n’avait rien à envier aux hybrides et s’était vite fait à l’idée que les hybrides étaient là pour travailler et les humains pour en profiter. Ceci dit, elle ne  refusait pas la proposition d’un hybride comme compagnon de jeu ; elle était fille unique. Rosheen n’avait jamais été pourrie gâtée comme on peut le croire. Bien que ses parents bénéficiaient d’une situation financière plus que correcte, ils ne s’embêtaient pas à lui offrir tout ce qu’elle désirait. Les hybrides étaient alors de parfaits compagnons de jeu que la petite fille blonde affectionnait particulièrement.

Rosheen devint aînée de la famille à ses onze ans quand son petit frère Jim vint au monde. Très vite, tout s’inversa ; elle n’était plus l’attention principale de ses parents et était reléguée au second plan, au même que les hybrides employés. Une légère tension commença à entrer en jeu, une animosité commençait à naître en elle à l’égard de son frère. Ce dernier était couvert d’affection mais on assurait à la fillette qu’on l’aimait autant que son frère. Elle tentait d’attirer l’attention de ses parents par diverses façons, plus ou moins bonnes. Généralement, ça ne marchait pas et elle se retrouvait punie. Une certaine forme de rancœur en elle se  développait pour les hybrides, car eux recevaient de la reconnaissance pour leur travail. On leur disait merci, bon travail. Rosheen n’avait pas le droit à tout ça, ses bonnes notes à l’école étaient devenues banales et les histoires qu’elle inventait n’intéressaient plus personne.

Quelques années plus tard, alors que Jim jouait au fond de la cuisine avec son jouet préféré, Rosheen s’approcha de lui. Une idée s’empara d’elle. C’est pour jouer lui dit-elle. La blonde arracha la peluche des mains de son frère, et s’amusa à la brandir en l’air. Le bambin commença à pleurer, beuglant des mots pour qu’elle lui rende. C’était presque agréable, mais fatigant pour les oreilles. Elle le jeta alors avec force sans savoir où il atterrirait. La peluche traversa le couloir et s’engouffra dans l’escalier conduisant à la cave. Jim se précipita sur le seuil de l’escalier, non sans sangloter. Rosheen s’approcha. Mince, tu vas devoir aller le chercher… Pardon Jimmy dit-elle en se retenant de rire. Le petit ne cessait de pleurer et Rosheen perdait patience. Qu’est-ce que tu attends, vas-y ! Sans réfléchir, elle donna un coup de pied dans les jambes de son frère. Ce dernier dévala les escaliers dans le noir. Boum, boum, faisait le corps de l’enfant en tapant sur les marches en béton. Une fois que le vacarme eut cessé, Rosheen descendit à son tour en quatrième vitesse après avoir allumé la lumière. En bas était étendu Jim, le cou de travers et sa jambe gauche anormalement pliée en deux. Du sang coulait de son nez et de sa bouche, et ses yeux étaient encore grands ouverts. Rosheen se précipita aux côtés de son frère, paniquée, s’excusant de toutes les manières possibles. Elle le prit difficilement dans ses bras mais ses membres retombèrent mollement. Rosheen commença à pleurer et à regretter ce qu’il s’était passé quelques secondes auparavant. Les parents alertés par les appels de la jeune fille accoururent. Quelques minutes plus tard, la police était sur les lieux. On demanda à Rosheen si elle pouvait expliquer les circonstances de ce drame. Après avoir séché ses larmes, elle déclara d’une voix tremblante et le regard dans le vide : Il est tombé. Il a glissé sur le tapis, et est tombé.    
Rosheen passait la plupart de son temps à l’extérieur, attendant avec impatience la majorité pour quitter  la maison familiale. Tout lui rappelait l’incident, cet incident volontaire où son petit frère était décédé. Une fois qu’elle eut atteint l’âge de partir, elle choisit Londres comme ville où vivre. La capitale semblait parfaite pour s’installer. Elle décida de couper les ponts avec ses parents et de vivre d’après ses propres revenus. Elle enchaîna les petits boulots et les rencontres plus ou moins déplaisantes.